L’étude récemment publiée dans Environmental Science & Technology Letters portait sur 231 produits cosmétiques achetés aux États-Unis et au Canada [1] et donc soumis aux réglementations de ces deux pays en matière d’ingrédients cosmétiques. Toutefois, cette nouvelle étude s’appuie sur des recherches antérieures plus limitées qui ont détecté des PFAS dans des cosmétiques vendus en Europe et au Japon.
Présence de fluor
En utilisant une technique de spectroscopie basée sur l’émission de rayons gamma induite par les particules (PIGE) pour détecter rapidement les concentrations totales de fluor, les chercheurs ont, dans un premier temps, trouvé que la plupart des mascaras waterproof, rouges à lèvres liquides, et fonds de teint testés contenaient du fluor, indiquant selon eux « la présence probable » de PFAS.
Dans le détail, plus des trois quarts des mascaras waterproof analysés, mais également près des deux tiers des fonds de teint et rouges à lèvres liquides et plus de la moitié des produits pour les yeux et les lèvres, présentaient des concentrations élevées en fluor, indiquent les chercheurs.
Au moins quatre PFAS dans certains produits
Les produits dans lesquels les niveaux de fluor étaient les plus élevés ont fait l’objet d’analyses plus approfondies. Verdict : ils contenaient tous au moins quatre PFAS que les chercheurs qualifient de « préoccupants ».
Au total, vingt-neuf produits ont été sélectionnés pour une analyse plus approfondie, qui a révélé des niveaux détectables d’au moins quatre PFAS spécifiques pour tous. Les auteurs de l’étude précisent qu’il s’agissait notamment de « PFAS qui se décomposent en d’autres PFAS connus pour être hautement toxiques et nocifs pour l’environnement ».
Parfois surnommées « produits chimiques éternels », les PFAS ont fait l’objet d’études et évaluations ayant montré - pour certaines - leur persistance dans l’environnement et leurs effets nocifs sur la santé.
Aucune mention sur l’étiquette
L’étude révèle par ailleurs que seuls quelques rares produits, parmi ceux analysés de façon plus poussée, mentionnaient la présence de ces substances sur la liste des ingrédients.
Selon les auteurs de l’étude, cela peut être lié aux « multiples exemptions et guides d’utilisation qui ont été généralisées pour les polymères, les silanes et les siloxanes, les additifs colorants et les composés substitués » et qui compliquent l’utilisation de l’International Cosmetic Ingredient (INCI) Dictionary and Handbook.
Les fabricants évaluent la sécurité des produits, rappelle le PCPC
Selon le Personal Care Products Council (PCPC), l’organisation professionnelle regroupant les principaux fabricants de cosmétiques aux États-Unis, un partie du fluor détecté dans l’étude pourraient résulter de traces de matières présentes naturellement dans l’environnement ou dans le processus de fabrication. « Comme ces traces de substances ne sont pas intentionnellement ajoutées aux produits, elles n’ont pas à figurer sur l’étiquette. La FDA reconnaît leur possible présence et fournit les niveaux admissibles », a réagi Alexandra Kowcz, Chief Scientist du PCPC.
« Tous les produits cosmétiques et leurs ingrédients sont soumis à la même exigence de sécurité en vertu du FD&C Act - ils doivent faire la preuve de leur innocuité pour les consommateurs avant leur commercialisation. L’étiquetage de ces produits doit être véridique et non trompeur », a-t-elle ajouté.
Proposition de loi sénatoriale
Dans la foulée de la publication de l’étude, les sénateurs Susan Collins (Républicains-Maine) et Richard Blumenthal (Démocrates-Connecticut) ont déposé la proposition de loi No PFAS in Cosmetics Act demandant à la FDA d’interdir l’introduction de PFAS dans les produits cosmétiques.
Plusieurs PFAS ont par ailleurs été interdits en Californie lors de l’adoption du Toxic Free Cosmetics Act, l’année dernière.
« Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sont un groupe diversifié de produits comprenant plus de 6000 ingrédients aux propriétés chimiques très différentes. Il est inapproprié de supposer que tout ce qui contient un atome de fluor a le même profil sanitaire. (...) Le PCPC, en collaboration avec l’Environmental Working Group, a soutenu l’interdiction de l’utilisation de certains PFAS dans les cosmétiques. Nos sociétés membres prennent très au sérieux leur responsabilité en matière de sécurité des produits et la confiance que les familles accordent à ces produits. La science et la sécurité sont à la base de tout ce que nous faisons », a tenu à souligner Alexandra Kowcz.